©Mathieu-N-J Langlois 2021 — Après le feu de 1922, le diocèse entrepris la reconstruction de la primatiale basilique-cathédrale Notre-Dame-de-Québec.
En 1871, le Congrès américain vote les lois qui mettent un terme aux activités du premier Klan. Le Klan renaît pourtant de ses cendres en 1915 et il se répand comme une trainée de poudre, autant dans les états du Nord que du Sud. En 1923, « l’Empire Invisible » compte trois millions de membres et s’étend outre-frontière, d’abord à Montréal, puis en Colombie-Britannique, aux Maritimes, en Ontario et finalement dans les Prairies.
Source : Xénophobie et racisme : le Ku Klux Klan
Il y a déjà cent ans cette année, le 22 décembre 1922, un terrible incendie ravageait la basilique-cathédrale Notre-Dame-de-Québec. Les haut-lieux canadiens-français succombaient aux flammes les uns après les autres, et dans un laps de temps très court, tandis que les membres toujours plus nombreux du Ku Klux Klan au Nord des États-Unis venaient recruter au Canada. Les mois précédents avaient vu brûler l’illustre sanctuaire de la Bonne-Sainte-Anne à Beaupré, le Collège de Saint-Boniface et l’école Provencher au Manitoba, et d’autres églises et institutions canadiennes-françaises ! La cause de la majorité de ces feux n’a jamais été identifiée et le plus souvent la version officielle place l’électricité en tête des probabilités. Par contre, l’aversion du Ku Klux Klan pour le catholicisme était réelle, et l’électricité semblait savoir viser d’une manière spéciale les phares intellectuels et spirituels du peuple Canadien-Français, ce qui emmena plusieurs à s’écrier avec une certaine pointe d’humour « Même l’électricité est protestante ! ».
C’est donc avec cette vision d’une époque troublée que l’on doit comprendre le poème de Nérée Beauchemin, un poème qui déplore la perte du site le plus important des Canadiens-Français. Devant la perte de la basilique-cathédrale Notre-Dame-de-Québec, première paroisse et mère de l’Église en Amérique au Nord du Mexique, il laisse aller sa complainte et ne mâche pas ses mots, en qualifiant la destruction d’enfer et de sacrilège.
Lorsque l’on vit les toits, les voûtes, l’archivolte
Crouler, et le ciel d’or de l’abside s’ouvrir,
Tous ont senti le choc, le sursaut, la révolte
Des autels dont les saints ne veulent pas mourir.Et tous, devant l’enfer des sacrilèges flammes,
Dont la rage, parfois, semble atteindre les cieux,
Frémirent, angoissés, consternés, et les femmes
Détournèrent la tête et fermèrent les yeux.C’était la vénérable église vieille France,
Très sainte par le sacre et par le souvenir,
Qui, pour tous, presque humaine, exprimait la souffrance
De l’aïeule qui meurt sans pouvoir nous bénir.Elle gît, maintenant, sous un linceul de cendre.
Dans l’horreur des parvis où tout est vide et noir,
Des siècles éplorés, la voix se fait entendre :
Un souffle, une ombre, une âme y soupire, le soir.Rien n’est plus, rien n’est plus de la robe et des voiles,
Des satins, des brocarts, des orfrois, des velours,
Des parures de lys, des couronnes d’étoiles,
Que portait Notre-Dame aux fêtes des grands jours.Rien n’est plus de la gloire historique des dômes
Arc-boutés dans le roc pour une éternité.
Rien n’est plus dans le ciel en deuil que les fantômes
D’un beffroi morne et d’un clocher décapité.L’airain n’ébranle plus les tours de la prière.
La chère basilique, elle est morte pour nous.
À peine, à son chevet, une dalle, une pierre
Où nous pourrions prier et pleurer à genoux.Morte ! oh ! non. De l’encens qui monte des lieux sombres
Où s’aligne, à pleins rangs, un peuple de défunts,
Du vieil encens pieux qu’exhalent les décombres,
L’affreux bûcher n’a pas brûlé tous les parfums.Non. Celle dont la mitre illustre les diptyques
Va renaître, non pas des cendres que le feu
Consume, mais des cœurs issus des cœurs antiques,
Cœurs profonds, toujours pleins des richesses de Dieu.
— Nérée Beauchemin, Patrie intime, 1928
Très bon. Merci.
J’aimeJ’aime